Quel avenir pour le concept de TOD au Canada?

Publié le : 19 Déc 2023
La reprise post-COVID constitue une menace pour la mise en œuvre des développements axés sur les transports en commun, mais les avantages économiques et sociaux de ce modèle de développement urbain ne se limitent pas à l’amélioration des liaisons avec les centres urbains populeux.

Quel avenir pour le concept de TOD au Canada?

Le concept du développement axé sur le transport en commun (ou TOD pour Transit-Oriented Development) qu’il concerne une ligne de transport ferroviaire, souterrain, un train léger sur rail, un tramway ou un service rapide par bus a été l’une des pierres angulaires de la renaissance de nos villes au cours des dernières décennies. Cette idée est d’une simplicité remarquable : elle stipule que les usagers choisissent de ne pas se déplacer en voiture lorsque les individus et les activités urbaines se concentrent autour des principaux accès au transport en commun. Avant même l’arrivée des voitures, c’est d’après les principes TOD qu’ont été développé les systèmes modernes de transport en commun. Si le concept a perdu en popularité durant le boom automobile de la seconde moitié du XXe siècle qui a donné naissance à bon nombre de banlieues tentaculaires et de centres commerciaux il est récemment remis au goût du jour pour offrir une forme urbaine plus durable.

À Montréal, le concept de TOD a été intégré à notre cadre de planification en 2011, avec l’élaboration et la publication du Plan métropolitain d’aménagement et de développement (PMAD) de la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM). Ce document énonce les principes directeurs du développement durable de la région métropolitaine de Montréal (CMM), qui doivent être pris en compte dans le plan d’urbanisme de chaque municipalité et arrondissement. La CMM exige que 60 % de la croissance future de la région métropolitaine de Montréal se mette en place dans un périmètre de moins d’un kilomètre autour d’une station de métro, de train ou de train léger, ou à moins de 500 mètres d’une station de tramway, d’autobus ou d’autobus rapide. La CMM a également fixé des seuils de densité minimaux pour ces zones, tels qu’illustrés à la Figure 1.

Figure 1 : Les zones TOD de la grande région de Montréal, et les seuils de densité en logement[1].
Reprise post-COVID : Des risques majeurs pour la survie du modèle TOD                                                                                                                

La densité d’usagers dans les transports en commun est devenue une préoccupation importante en raison de la pandémie de la COVID-19. Il sera très difficile de pouvoir compter sur les transports en commun pour desservir les développements à haute densité, tant et aussi longtemps que des mesures de distanciation sociale seront en place et que la COVID menacera notre santé. L’impact psychologique de cette pandémie pourrait freiner l’appétit des individus pour des zones urbaines populeuses.

 

Bien que cela puisse paraître inévitable à court terme, il faut éviter qu’une reprise de la vie urbaine fondée sur l’utilisation de la voiture ne vienne compromettre l’enthousiasme suscité par la régénération urbaine et la mobilité durable dans les quartiers piétonniers et développements TOD. Les modèles émergents de développement urbain comme celui de la ville du quart d’heure (15-minute city), concept qui a vu le jour à Paris – mettent de l’avant des quartiers à échelle humaine qui misent sur la mobilité durable. Ce modèle est « fondé sur quatre grands principes : proximité, mixité, densité et ubiquité, […] les zones individuelles de la ville doivent pouvoir remplir six fonctions sociales : habiter, travailler, s’approvisionner, se soigner, s’éduquer et s’épanouir »[2].

Comme le confinement a fait en sorte que nos vies se déroulent à une échelle plutôt locale, ce modèle de développement urbain pourrait bien être l’avenir des TOD. Cette approche va bien au-delà de la simple planification des infrastructures de transport en commun et des déplacements utilitaires dans les zones à forte densité. Le modèle de la ville du quart d’heure est plutôt une approche holistique qui prend en compte de nombreux éléments, comme l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle, les interactions sociales et familiales, et la diffusion des opportunités économiques au sein des métropoles.

 

Alors que nous nous efforçons de garantir l’accessibilité et l’inclusivité, nous devons être conscients du fait que les frontières qui divisent nos quartiers peuvent représenter des barrières et être les causes d’une ségrégation sociale. Ces frontières doivent être pensées et mises en place de manière à favoriser une créativité urbaine et une connectivité entre les différentes zones de la ville. Dans le cadre d’une conférence, Metrolinx, agence de transport des régions du Grand Toronto et du Grand Hamilton, a formulé certaines inquiétudes concernant les habitudes de déplacements que l’on pourra observer après la pandémie. Dans le cas où le télétravail demeure une pratique courante, Metrolinx prévoit une augmentation des déplacements entre les régions périphériques, plutôt que vers le centre-ville. Si tel est le cas, Metrolinx devra s’assurer de maintenir un équilibre entre les opérateurs de transport de chaque municipalité et GO Transit, le réseau de transport en commun régional.

Au cours de la même conférence, la Ville d’Edmonton a discuté de son réseau de train léger sur rail, présentement en cours d’installation. À l’instar du modèle de la ville du quart d’heure, le plan de transport de la Ville d’Edmonton identifie les zones accessibles par des trajets de 15 minutes et moins, et en fait l’objet de ses projets de développement et de croissance. Des modèles comme celui-ci permettent de diminuer les frontières de ségrégation entre les quartiers.

Cette tension entre centres planifiés et périphéries informelles est au cœur de l’avenir du concept TOD, dont nous aurons peut-être un aperçu lorsque les préoccupations liées à la COVID-19 ne feront plus partie de nos quotidiens. Peut-être alors, pourrons-nous passer d’un développement axé sur le transport en commun, à des communautés centrées sur la durabilité et l’inclusivité.


[1]Reproduction depuis Communauté Métropolitaine de Montréal, 2011. Carte 7 – Les aires TOD – Seuils minimaux de densité résidentielle.https://cmm.qc.ca/wp-content/uploads/2019/02/C07_PMAD_Aires-TOD_2018-01.pdf

[2] Kim Willsher, The Guardian—Paris Mayor unveils ’15-minute city’ plan in re-election campaign, 7 février 2020.

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